Topographies des récits de grâce: Cartographie contextuelle des lettres de pardon dans les Pays-Bas méridionaux, 15e siècle - 17e siècle.

À propos

À la découverte d'histoires de violence et passion dans les Archives de l'État en Belgique

Au début de l'Europe moderne, pardonner le crime était un processus complexe de reconstruction de la paix sociale. Les Archives de l'État en Belgique contiennent des milliers de lettres de grâce accordées par les monarques aux auteurs de crimes graves dans les Pays-Bas méridionaux bourguignons et habsbourgeois. À travers la narration du pétitionnaire, vous obtenez un aperçu fascinant de la vie quotidienne de l'Ancien Régime. En tant que lecteur, vous vous sentez comme la mouche proverbiale sur le mur. De plus, les histoires contenues dans ces lettres de pardon offrent des informations précieuses, souvent uniques, sur l'histoire locale et familiale. Souhaitez-vous nous aider à divulguer ces récits de pardon?

Lettres de pardon
Qu'est-ce qu'une lettre de rémission?

Au début des Pays-Bas modernes, une lettre de rémission (‘brief van remissie’ ou ‘lettre de rémission’) était une charte accordée au nom du monarque bourguignon ou habsbourgeois et délivrée par la chancellerie pour pardonner les crimes commis par un individu ou une communauté. Pour obtenir une lettre de grâce, chaque suppliant devait soumettre une demande de grâce au monarque et à son conseil, dans laquelle il ou elle détaillait les circonstances de son crime et expliquait pourquoi il devait être gracié (par ex., l'homicide a été commis en état de légitime défense ou par accident). Si le cas était considéré comme pardonnable, le souverain et ses conseillers ordonnaient à la chancellerie d'émettre une charte de grâce. Ensuite, e bénéficiaire achetait sa lettre de grâce en payant les frais de procédure et l'apportait à un tribunal de justice local pour faire approuver la grâce et prendre un arrangement final avec la partie victime.

Pour les lecteurs d'aujourd'hui, ces lettres de grâce sont des documents fascinants qui proposent de se plonger dans la vie des gens d'autrefois. Le préambule de chaque lettre développe une argumentation à l'appui de la décision du monarque, qui est en fait une copie de la pétition initialement déposée par le destinataire, dans laquelle il raconte comment il a commis son crime. Ces histoires riches et vivantes sont ce qui rend les lettres de pardon uniques, mais comme nous le montrent tous les bons romans policiers et séries télévisées, les aveux d'un coupable doivent toujours être analysés avec soin, car il ou elle peut ne pas dire la vérité afin d'échapper à la punition. Néanmoins, à la lecture de ces lettres de pardon, vous découvrirez les passions, les peurs , voire la haine de personnes ayant vécu il y a plusieurs siècles. Vous en apprendrez plus sur les bagarres de taverne, les adultères, les disputes entre voisins, ou encore les conflits religieux survenus dans les régions et les lieux que vous connaissez. Peut-être trouverez-vous même les noms de certains de vos ancêtres qui ont été, d'une façon ou d'une autre, impliqués dans ces histoires de pardon?

À propos du projet

Le projet PARDONS (‘Topographie des récits de grâce: Cartographie contextuelle des lettres de pardon dans les Pays-Bas méridionaux, 15e-17e c.’) est un projet de recherche de quatre ans financé par le Service public fédéral de programmation Politique scientifiqueBRAIN-be 2.0 qui a été lancé aux Archives de l'État en août 2021, en collaboration avec la KULeuven, l'UCLouvain et Histories vzw. L'objectif de ce projet est de digitaliser, de retranscrire et de rendre publiquement accessible les vastes collections de lettres de grâce rendues par les princes habsbourgeois ou bourguignons et disponibles aux archives nationales en Belgique, afin de fournir une histoire innovante du pouvoir et des relations sociales dans les premiers Pays-Bas modernes, y compris à des moments de tensions politiques et religieuses comme la révolte hollandaise. Ces milliers de lettres de grâce sont l'un des éléments les plus importants du patrimoine archivistique moderne de nos régions, non seulement en raison de la richesse de leurs structures narratives et de leurs contenus juridiques, mais aussi en raison de la durée exceptionnellement longue qu'ils couvrent. Ces recueils fascinants d'histoires de violence, de conflit, et de perturbation de la vie quotidienne font partie intégrante du patrimoine matériel et culturel de la Belgique.

Dans la première phase du projet, nous nous concentrons sur les lettres de grâce conservées dans les archives du Conseil de Brabant (c. 1480-1660), qui couvrent les crimes commis dans le duché de Brabant. Ensuite, dans un second temps, nous investiguerons les lettres de grâce des archives du Conseil privé espagnol (c. 1540-1700), qui couvrent l'ensemble des Pays-Bas méridionaux.

Pour en lire davantage

Vous souhaitez en apprendre davantage sur les lettres de grâce? En plus de notre webinaire, vous devriez jeter un œil aux ouvrages et articles suivants:

  • Peter Arnade et Walter Prevenier, Honor, vengeance, and social trouble. Pardon letters in the Burgundian Low Countries, Ithaca, Cornell University Press, 2015.
  • Natalie Zemon Davis, Fiction in the archives. Pardon tales and their tellers in sixteenth-century France, Stanford, 1987.
  • Claude Gauvard, « De grace especial ». Crime, État et société en France à la fin du Moyen Âge, Paris, Publications de la Sorbonne, 1991. Disponible en openaccess: https://books.openedition.org/psorbonne/35658?lang=fr
  • Quentin Verreycken, « “En nous humblement requerant”: Crime narrations and rhetorical strategies in late medieval pardon letters », Open Library of Humanities, 5/1: 62, 2019, p. 1‑31. Disponible en openaccess: https://olh.openlibhums.org/article/id/4599/
  • Marjan Vrolijk, Recht door gratie. Gratie bij doodslagen en andere delicten in Vlaanderen, Holland en Zeeland (1531-1567), Hilversum, Verloren, 2004.
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